1111

A la rencontre d’agents et d’agentes de la fonction publique territoriale

  • Article publié le 14 août 2023
  • /
  • 217 visites

A la rencontre de Sébastien, Anna et Fabrice travaillant à Suez

Dans le prolongement de la campagne "fier·es d’être fonctionnaires", Clément, stagiaire à la Fédération CGT des Services publics, est allé à la rencontre d’agents et d’agentes de la fonction publique territoriale.
Clément les a contacté.es avec un ton légèrement différent pour mieux aborder l’humain dans le travail et la manière dont les agents et agentes peuvent le ressentir.


On a soif, on se lève pour aller se servir un verre d’eau. Mince, plus de bouteille, tant pis… allons boire au robinet, on tourne les robinets, on boit puis on éteint. Des gestes quotidiens d’une facilité déconcertante au point qu’on ne se pose jamais la question d’où provient l’eau ? D’où est-elle extraite ? Comment arrive-t-elle jusque chez nous ? Quelles entreprises nous permettent d’y avoir accès ? Qui sont les salarié·es et comment travaillent-ils·elles ? Pour répondre à cela, je vous propose de lire l’interview de trois salarié·es de l’entreprise Suez.

Suez est une entreprise créée en 2003 sous le nom de Suez Environnement spécialisée dans le traitement de l’eau, des déchets et même énergétique. Elle change de nom d’enseigne en 2015 pour ne garder que Suez. En 2021, l’entreprise subit une OPA sur 70 % de ses actions de la part de Véolia. Suez est spécialisée dans la gestion de l’eau et des déchets. Elle emploie cette année 40 000 salarié·es pour un chiffre d’affaires de 9 milliards d’euros. Parmi ces 40 000 salarié·es, on retrouve donc Sébastien, Anna et Fabrice.

Sébastien travaille au pôle de l’eau potable de l’entreprise depuis 1996, il est responsable des métiers performances pour la région Champagne ainsi que coordinateur principal chez Suez groupe. Après avoir refusé deux fois leur offre parce que le salaire n’était pas intéressant, il a fini par accepter. Anna et Fabrice, quant à eux·elles, sont arrivé·es dans l’entreprise respectivement en 2001 et 2002. L’une travaille depuis 2004 (après une pause de 2 ans) où elle fait du support informatique sur tous les logiciels qui concernent la clientèle (relève, facturation), crée des comptes pour les gens pour les centres d’appels et l’autre travaille en tant que PRC, c’est-à-dire qu’il fait de la dépose et de la repose de compteur avec du paramétrage et de la radio relève. Si leurs missions respectives sont différentes, elles peuvent toutefois se rejoindre. En effet, dans le cas où Fabrice aurait des difficultés pour trouver un compteur ou si sa tablette ne marchait pas, Anna pourrait lui venir en aide en faisant un support.

Si Suez est allée chercher Sébastien, ce n’est pas le cas pour Anna et Fabrice. En effet, Anna est arrivée ici après avoir répondu à une annonce dans Le Parisien. L’attention dont elle a bénéficié durant sa formation, la gentillesse et la transmission du savoir dont ont fait preuve ses formateurs ont fait que, 20 ans après, elle est toujours là. L’arrivée de Fabrice est similaire, après avoir répondu à une annonce dans le journal, il a commencé à travailler sur le réseau de canalisation et les branchements de terrasse. Après un accident de travail, il a été contraint d’aller travailler en magasin, une fois rétabli il est tout de suite retourné sur le terrain.

Si faire du support informatique peut paraître comme une des tâches les moins difficiles à réaliser, il n’en est pourtant rien. Il faut toujours se remettre en question, toujours apprendre de nouveaux logiciels pour être sûr·e d’être capable de répondre à la demande du client. Et pour cela également, il faut connaître et avoir été sur le terrain. Sans ça, cela sera compliqué de comprendre ce que dit le client. Heureusement pour eux, ils ont gravi les échelons en commençant sur le terrain. C’est grâce à cette expérience et à l’aide apportée par leurs formateurs, qu’eux-mêmes vont pouvoir à leur tour aider les nouveaux et nouvelles arrivant·es.

Selon Anna, cette aide et cette prise de temps dans la formation dont elle a pu disposer ne sont plus d’actualité aujourd’hui. La nouvelle génération est beaucoup moins dans une approche de fidélité à l’entreprise car elle sait qu’elle ne restera pas. La faute sans doute à un salaire jugé trop bas et des conditions de travail trop difficiles.

Fini l’apprentissage progressif, dorénavant on arrive diplômé et directement prêt à travailler à tel endroit. Fini la fidélité et les questions sur le travail en lui-même, place aux questions sur les tickets restaurant et les RTT... une vraie différence de conception et de rapport à l’entreprise entre deux générations qui ne sont pourtant pas si éloignées que ça.

Si le salaire est un frein à l’embauche, on ne peut pas dire que les conditions de travail soient d’un grand secours. Quand il fait chaud, vous avez trop chaud et pareil quand il fait froid. L’uniforme est beaucoup trop imposant et dorénavant, pour aller dans les caves, les releveurs ne portent plus de casquettes mais des casques, par volonté des dirigeants... Si vous rajoutez à ça le travail de nuit, potentiellement sous la pluie, on comprend un peu plus aisément pourquoi très peu de monde désire être sur le terrain. Mais sans ces travailleurs et travailleuses, nous n’aurions peut-être pas accès à l’eau dans nos robinets. Qui pour poser les canalisations ? Réparer la fuite pendant la nuit ? Pomper l’eau ? La filtrer ? Pour continuer à faire cela il faut embaucher certes, mais il faut, pour donner envie aux gens d’être releveurs, vendre le métier et bien les traiter une fois qu’ils sont là. Et non plus les traiter comme des rats en les faisant passer par un sous-sol pour entrer et les obliger à se changer avant de manger.

Le travail sur le terrain n’est pas le seul à pâtir de mauvaises conditions de travail. Le travail de bureau est également touché. L’évolution de notre société nous invite à repenser notre façon de travailler. On va moins faire attention aux employé·es et à leurs besoins, le but étant que le travail soit bien fait pour générer un maximum de profit. Par exemple, dans un service, s’il n’y a que 7 chaises pour 10 personnes, et bien 3 personnes iront de facto en télétravail. Du fait du flex au fix (casier où sont rangées les affaires des employés), Suez a voulu pousser l’expérience encore plus loin. En effet, l’idée était qu’à midi, au moment de la pause déjeuner, les employé·es devaient ranger leurs PC dans leurs casiers et nettoyer leurs places. Et si en revenant ils y trouvaient quelqu’un d’autre, ils devaient eux-mêmes chercher une autre place. Refus catégorique des employé·es. Les rapports humains disparaissent progressivement, lors de réunions chacun a son casque sur les oreilles pour écouter, ou bien encore les réunions se suivent dans des salles différentes à l’intérieur même de l’entreprise.

Si le métier exercé par nos 3 interviewé·es est mal vu par la population, c’est certainement car au final on ne le connaît pas bien. Un vieil adage dit, ne juge pas si tu ne connais pas. Alors comment mieux connaître ce métier ? A travers des documentaires qui suivraient un·e employé·e au cours de sa journée, plus de publicité également.
Faire un métier doit être un plaisir, et encore plus celui de releveur ou bien de faire du sport informatique. Malheureusement, de plus en plus de personnes ne se plaisent pas dans le métier qu’elles exercent et ne voient en lui qu’une façon de remplir le frigo.



A propos

La Fédération CGT des services publics rassemble les personnels des :
 services publics territoriaux, communes, départements, régions et leurs établissements ;
 services départementaux d’incendie et de secours - SDIS (Sapeurs pompiers) ;
 secteurs publics et privés du logement social ;
 secteurs privés des eaux et de la thanatologie (Pompes funèbres)
Elle regroupe plus de 85 000 adhérents, organisés en syndicats dans leurs collectivités ou entreprises, pour défendre leurs intérêts d’agents et salariés du service public, en convergence avec les autres salariés, les usagers et les populations.

Contact

Fédération CGT des Services publics
263 rue de Paris - Case 547
93515 MONTREUIL CEDEX

01 55 82 88 20