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  • Article publié le 4 janvier 2022
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CGT Fonction publique | Note sur l’ "obligation " du télétravail dans la Fonction publique

Montreuil, le 3 janvier 2021

Lors de sa conférence de presse du lundi 27 décembre, le Premier ministre a annoncé qu’à compter du 3 janvier « pour une durée de 3 semaines, le recours au télétravail sera rendu obligatoire […] à raison de 3 jours minimum par semaine et si possible 4 jours ». Le soir même, la ministre de la Fonction publique a annoncé l’extension de ces mesures à la Fonction publique.

Concernant la Fonction publique de l’État, cette annonce a été confirmée par une circulaire de la ministre en date du 29 décembre, adressée aux autres ministres : « Je vous demande donc de transmettre sans délais des instructions aux administrations, centrales et déconcentrées, ainsi qu’aux établissements publics placés sous votre autorité, pour imposer, à compter du 3 janvier 2022 et pour une durée de trois semaines, trois jours de télétravail aux agents dont les fonctions le permettent et sous réserve des nécessités de service. Les agents qui le peuvent seront incités à réaliser 4 jours de télétravail si cela est possible. ».

Ces annonces appellent plusieurs remarques :

1-Le télétravail n’est pas une mesure de protection miracle puisque de nombreux postes ne sont pas télétravaillables. Pour ces postes, nombreux dans la Fonction publique, toutes les mesures de protection doivent être prises, ce qui est loin d’être le cas dans tous les secteurs. Compte tenu de l’évolution pandémique, la convocation des CHSCT est nécessaire pour actualiser les mesures en vigueur portant sur l’ensemble des personnels, que leurs missions soient ou non télétravaillables.

2-Le télétravail n’est pas en en lui-même un mode d’organisation du travail idéal, en particulier du point de vue des risques psycho-sociaux. Les conditions de son extension suite aux dernières consignes gouvernementales doivent faire l’objet de discussions avec les personnels et leurs représentants, et la convocation des CHSCT est donc nécessaire.

3-Le caractère obligatoire du télétravail en période exceptionnelle demeure sujet à débat.

Dans le secteur privé, aucun texte ne permet à un employeur d’imposer le télétravail. Le gouvernement entend en fait s’appuyer sur les obligations de protection de la santé des salariés définies par le Code du Travail. A partir de ces obligations, et compte tenu des consignes données le 27 décembre sur l’obligation du télétravail, le gouvernement entend pouvoir pénaliser les employeurs « récalcitrants » par le biais d’amendes administratives prévues dans l’actuel projet de loi « passe vaccinal », projet qui devrait être voté à la mi-janvier.

C’est l’occasion de souligner avec nos camarades du SNTEFP CGT que les inspectrices et inspecteurs du travail ne disposent pas des moyens suffisants, humains en particulier, pour contrôler cette mise en œuvre du télétravail « obligatoire » dans les entreprises. Il convient par ailleurs de rappeler que dans une tribune parue dans Libération, notre camarade Anthony Smith avait proposé la création d’un dispositif permettant l’arrêt immédiat de l’activité d’une entreprise qui ne prendrait pas ou trop peu de mesures de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés face à l’exposition au Covid. La situation présente confirme s’il en était besoin qu’il faut conforter l’indépendance de l’inspection du travail.

Dans la Fonction publique, le principal support règlementaire est l’article 4 du décret n° 2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature. Alors que la logique générale du décret précise que le télétravail peut être mis en place pour un maximum de 3 jours à la demande de l’agent et sur autorisation de l’employeur, l’article 4 précise qu’il peut être dérogé à ces principes dans plusieurs cas dont « 4° Lorsqu’une autorisation temporaire de télétravail a été demandée et accordée en raison d’une situation exceptionnelle perturbant l’accès au service ou le travail sur site. ».

Lors des dernières négociations relatives au télétravail dans la Fonction, la CGT avait demandé que le décret soit modifié pour préciser ce qui pouvait relever d’une « situation exceptionnelle ». Le gouvernement n’a pas répondu favorablement à cette demande.

Le ministère s’appuie aujourd’hui sur l’article 13 de l’accord télétravail du 13 juillet 2021 ainsi libellé : « 13. Le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles. Le cadre réglementaire fonde le recours au télétravail sur une demande volontaire de l’agent et l’accord de sa hiérarchie. Les signataires conviennent qu’il est nécessaire de sécuriser et mieux encadrer le recours au télétravail contraint en cas de circonstances exceptionnelles. Il s’agit d’une organisation différente du travail rendue nécessaire en cas de circonstances exceptionnelles durables, notamment en cas de pandémie ou de catastrophe naturelle, qui peuvent conduire les employeurs à imposer le télétravail pour permettre de concilier la protection des agents et la continuité du service public. Ce régime spécifique doit s’accompagner d’un dialogue social soutenu. Ces modalités exceptionnelles doivent également être intégrées aux plans de continuité d’activité, là aussi dans le cadre du dialogue social de proximité. Les dispositions en matière d’indemnisation s’appliquent en cas de recours au télétravail imposé en période de crise. ».

Si la CGT considère évidemment que le télétravail constitue dans l’immédiat un moyen de protection qui doit être mis en œuvre dans les meilleures conditions possibles, elle maintient que sa mise en œuvre, y compris en circonstances exceptionnelles, devrait être encadrée au plan règlementaire et faire l’objet d’une modification du décret n° 2016-151, et qu’il est pour le moins étonnant qu’un accord puisse constituer en lui-même la base de mise en œuvre d’une mesure de cet ordre.

En l’état, la situation demeure en effet floue comme le démontre la Foire aux questions de la DGCL mise à jour au 29 décembre qui, concernant la mise en œuvre du télétravail en contexte pandémique, précise que « Les employeurs territoriaux sont vivement incités à imposer, à compter du 3 janvier 2022 et pour une durée de trois semaines, trois jours de télétravail à leurs agents dont les fonctions le permettent et sous réserve des nécessités de service. Les agents qui le peuvent seront incités à réaliser 4 jours de télétravail si cela est possible. ».

Concernant la Fonction publique hospitalière, la formulation retenue est la suivante (consignes du Ministère de la Santé en date du 29 décembre) : « Il convient de faire tout l’usage possible des dispositions de l’accord-cadre télétravail signé le 13 juillet 2021 qui, à son article 13, prévoit qu’en cas de circonstances exceptionnelles, les employeurs peuvent imposer le télétravail. Les chefs d’établissements devront imposer à compter du 3 janvier 2022 et pour une durée de trois semaines, trois jours de télétravail aux agents dont les fonctions le permettent et sous réserve des nécessités de service, en veillant au maintien des liens au sein du collectif de travail et à la prévention des risques liés à l’isolement des agents en télétravail. Les agents qui le peuvent seront incités à réaliser quatre jours de télétravail si cela est possible. »

L’obligation des trois jours de télétravail est avant tout une annonce d’ordre politique. Sa mise en œuvre, moyen parmi d’autres de protéger la santé des personnels, doit s’inscrire dans le respect des principes, d’ailleurs rappelés par le ministère, relatifs aux rôles des élus des personnels et des instances de représentation, au premier rang desquelles les CHSCT. Notons enfin que l’indemnisation des frais de télétravail s’applique y compris dans le présent cadre à caractère exceptionnel (indemnisation qui reste conditionnée au principe de libre administration s’agissant de la FPT et qui nécessite donc qu’une délibération soit prise par la collectivité).

Références
 Décret télétravail dans la Fonction publique n°2016-151
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000032036983/

 Accord télétravail de juillet 2021
https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/Espace_Presse/Montchalin/20210713_Accord_relatif_mise_%C5%93uvre_teletravail_fonction_publique.pdf

 Circulaire Fonction publique de l’État du 29 décembre 2021
https://www.fonction-publique.gouv.fr/circulaire-29-decembre-2021-relative-au-teletravail-dans-la-fonction-publique-de-letat-et-au-respect

 FAQ DGCL au 29 décembre 2021
https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/Covid-19/2021.12.29%20FAQ%20FPT.pdf

 Texte Ministère de la Santé du 29 décembre 2021 en pièce-jointe



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