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  • Article publié le 21 juillet 2021
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CGT | Projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire – remarques et interrogations de la CGT

Ces questions ont été formulées après examen de l’avant-projet de loi.

 Pour quelles raisons la fin de la période transitoire de la sortie de l’état d’urgence – initialement prévue au 30 septembre 2021 (vote de l’Assemblée nationale du 12 mai 2021) est-elle repoussée au 31 décembre 2021 (article 1er) ?

 Quel encadrement du droit au contrôle et à l’accès à certaines données personnelles et de santé ? Qui donne l’habilitation à un exploitant ou à un employeur de contrôler un usager ou un salarié ?

En effet, jusqu’alors la présentation, sur papier ou sous format numérique, des documents attestant de la vaccination ou d’un résultat négatif au test covid était « réalisée sous une forme ne permettant pas aux personnes habilitées ou aux services autorisés à en assurer le contrôle de connaître la nature du document ni les données qu’il contient. » (article 1er)

Désormais, c’est l’inverse puisque la loi instaure ce droit au contrôle et à l’accès aux données de santé et d’identité contenu par ces documents : le texte préciserait en effet que « la présentation, sur papier ou sous format numérique, des documents est réalisée sous une forme permettant seulement aux personnes habilitées ou aux services autorisés à en assurer le contrôle de connaître les données strictement nécessaires à l’exercice de ce contrôle. »

D’autant que l’employeur est tenu de respecter la réglementation relative aux données personnelles (RGPD), il ne peut collecter des données de santé du salarié (article 9 du RGPD). Or, en sollicitant ces justificatifs, il récolte bien ces données personnelles.

De surcroît, ce projet de loi déroge au secret médical. Qu’est ce qui empêchera demain un employeur de demander à son salarié le résultat de son check-up annuel pour bien vérifier qu’il est en bonne santé ?

 La loi prévoit-elle le droit pour un salarié de refuser, sans sanction, cette habilitation à contrôler un usager ? Il s’agit en effet d’une modification de ses missions et donc des termes de son contrat de travail.

 Dans une société où les tensions sont exacerbées, où les réactions violentes sont quotidiennes, quelles sont les mesures de protection envisagées pour protéger les salariés exerçant les contrôle, quelle prévention des RPS ?

 De même quelles mesures de formation sont envisagées pour préparer les salariés à l’exercice de cette nouvelle mission ?

 Comment peut-il être possible d’étendre le pass sanitaire sans concertation préalable dans les branches concernées et dans les entreprises, sans concertation préalable avec les IRP et la médecine du travail ?

 Plus généralement, quelle est la situation des mineurs par rapport à ce pass sanitaire ? En l’exigeant pour cette partie de la population, n’y a –il pas une atteinte disproportionnée aux droits des enfants ? Quid des mineurs isolés en situation de grande précarité ?

 Quels types de tests seront autorisés pour valider le pass sanitaire : PCR, antigénique, autotest, salivaire, sérologique ?

 Et selon le type de test autorisé, quelle sera la récurrence demandée pour être en conformité avec les exigences du pass sanitaire ?

 Demander le renouvellement d’un test, quel qu’il soit, toutes les 48heures semble disproportionné alors même que - dans le cas des salariés soumis à l’obligation du pass sanitaire - les absences ne pouvant entrainer de diminution de rémunération ne sont envisagées que dans les cas de rendez-vous médicaux liés à la vaccination. Quid des salariés ayant des contre-indications vaccinales ou étant en cours de vaccination, ce renouvellement de test leur est-il applicable ? Quelle prise en charge des éventuels frais si les tests sont rendus payants ?

 Dans le cas où un employeur interdit à un salarié d’exercer son activité, le salarié est-il rémunéré ? En effet, la décision de ne pas exercer son activité n’est pas le choix du salarié. Est-ce que l’employeur est le seul à décider, unilatéralement, de cette suspension, sans l’avis d’un tiers ? L’impossibilité d’exercer son activité n’est pas non plus prévue par le code du travail. Cet arrêt d’activité pourrait être considéré comme une suspension du contrat de travail, et l’employeur pourrait ne pas payer les salariés réfractaires, comme pour une suspension due à un arrêt de travail ?

 Sur quel motif un salarié pourra-t-il être licencié ?
En effet, un employeur pourra demander à un salarié de ne plus exercer son activité s’il ne présente pas son pass sanitaire. S’il est absent pendant 2 mois, son licenciement sera automatique mais sur quel motif puisque le texte ne le précise pas. S’agira-t-il d’un licenciement sui generis ? D’un licenciement pour absences désorganisant l’entreprise et l’obligeant à pourvoir à titre définitif au poste du salarié absent ? Quelles seront les indemnités du salarié et qui les assumera ? De plus, comment se prémunir d’éventuels choix sinon arbitraires à tout le moins opportunistes de licencier tel ou tel salarié ?

 La rupture anticipée du CDD est permise si le salarié ne répond pas à l’obligation de pass sanitaire. Aujourd’hui la rupture anticipée du CDD prenante la forme d’un licenciement n’est possible qu’en cas de faute grave du salarié. L’absence de pass sanitaire est-elle une faute grave ?

Par ailleurs, il sera également possible de suspendre l’exécution du cdd pendant deux mois.

Pendant ce délai le salarié précaire ne pourra ni s’inscrire à pôle emploi pour accéder à l’indemnisation chômage ni conclure un contrat de travail avec une nouvelle entreprises (par exemple non soumise au pass sanitaire).

 Quid du corps enseignant à partir de la rentrée prochaine ? leur vaccination sera-t-elle également rendue obligatoire ? Idem pour les élèves ?

 S’agissant des sanctions financières et pénales : n’aurait-il pas mieux fallu accompagner vers la vaccination les populations qui en sont le plus éloignées, celles notamment en rupture avec les politiques de prévention ?

 S’agissant des personnes exemptées de vaccination : cette possibilité n’est pas envisagée dans l’article 1er relatif à l’extension du pass sanitaire mais seulement à l’article 5 relatif à l’obligation vaccinale

 Les conseillers du salarié seront-ils obligés de fournir un pass sanitaire à l’employeur pour accompagner un salarié à un entretien préalable au licenciement ? Cet entretien implique par définition un lieu à l’écart du public, le pass sanitaire serait ici une exigence disproportionnée.

 L’obligation vaccinale ou le pass sanitaire s’applique y compris aux salariés et agents qui ne sont pas directement en contact avec le public (personnels administratifs par exemple) ce qui parait également disproportionné.

 L’article 6 prévoit l’autorisation d’absence pour se faire vacciner. Pourquoi cette autorisation n’est-elle pas étendue quand un salarié, dans l’attente de pouvoir se faire vacciner ou faisant partie des personnes exclues de la vaccination pour raisons médicales, est contraint de faire un test ?

 L’employeur sera-t-il en droit de demander un justificatif au salarié sans enfreindre le principe de confidentialité des données de santé ?

Montreuil, le 20 juillet 2021



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